jeudi, avril 27, 2006

Des mains qui parlent





Auguste Rodin
Les bourgeois de Calais
1884-1886
Musée Rodin

Paris



" Des mains indépendantes et petites qui , sans appartenir à aucun corps, sont vivantes.
Des mains qui se dressent , irritées et mauvaises
Des mains qui semblent aboyer avec leurs cinq doigts hérissés ,
comme les cinq gorges d'un chien d'enfer.
Des mains qui marchent,
qui dorment,
des mains qui s'éveillent..." Rilke




Egon Schiele
Autoportrait aux mains posées sur la poitrine , 1910
44.8/31.2 cm
Fusain, aquarelle et gouache





mercredi, avril 26, 2006

De l'ombre à la lumière-Rembrandt, Caravage

Dans le cadre de l’anniversaire du 400 ième anniversaire de la mort de Rembrandt, Le Rijksmuseum d’Amsterdam ( mais dans les salles du musée Van Gogh) , nous offre une confrontation Caravage(1571-1610) et Rembrandt.(1606-1669)

Exposition d’une grande intelligence, présentant les toiles par paire, par exemple, le « Ganymède enlevé par Jupiter » de Rembrandt face à l’ « Amour triomphant » du Caravage, « Le festin de Balthazar » du hollandais en parallèle au « Repas à Emmaüs » de l’italien …
Exposition permettant la découverte de chefs d’oeuvre disséminés dans le monde, que ce soit à Rome, New York, Madrid, Florence… et même appartenant à quelques heureux collectionneurs.
Dommage que le lieu un peu étriqué et la grande fréquentation empêche une communion avec les œuvres.


Bien sûr, on peut les comparer par leur volonté farouche de vivre leur art avec passion , envers et contre tout, mais aussi par le traitement de la lumière mais finalement, ils se rapprochent bien plus par leur génie. Choisir entre l’un ou l’autre est impossible !!


Le repas à Emmaüs 1601
Le Caravage
National Gallery Londres










Le Caravage,ce grand metteur en scène, théâtralise le moment par l’intrusion de la lumière , surprenant là, un geste, un regard, un sourire , un évènement.
Par la force des aplats de couleurs, par le cadrage, par le point de vue en contre-plongée, il affirme son propos, rendre avec force , violence et avec une sensualité troublante , le vrai et la beauté, la « divinité » de tout homme.
Ses pauvres bougres aux traits lourds , aux ongles sales , aux vêtements dépenaillés , là sur sa toile , représentants des scènes bibliques, auront choqué bien des membres du clergé.

Garçon avec un panier de fruits
galerie borghese
Rome
1593




Caravage aura délibérément été provocateur, par ses sujets réalistes, sa manière de peindre usant du noir , et même dans sa vie, homme violent, ambigu et irascible, vivant son homosexualité dans la marginalité. Il dira même « à la volonté de le ( tableau de la mort de la vierge) réussir pour rétablir mon crédit se mêlait l’obscur désir de me couler définitivement aux yeux du monde ».





Par contre chez Rembrandt, la lumière ressort du tableau, lumière dorée des chairs, chatoiement des draperies , le trait est vif, plus flou, l’expression psychologique des personnages d’une grande puissance, la vie y est une tragi-comédie shakespearienne tout en finesse et l’érotisme y est plus voluptueux.

La fiançée juive
Rijksmuseum
Amsterdam
1664



Ivre de peinture, jusqu’à la fin de sa vie , il nous livre une toile qui envoûte, aux traits simplifiés , pré impressionniste pourrait t’on dire. On comprend que Van Gogh y soit resté en pamoison pendant 15 jours

Dans la « fiancée juive » les mains racontent tout, la tendresse, la complicité, la retenue aussi.

Ah les mains en peinture, que ce soient celles chez Rodin, Schiele, …, les mains vivent.



site de l'expo
http://www.rembrandt-caravaggio.com/index_en.htm
pour comparer les oeuvres
http://www.rijksmuseum.nl/formats/container_remcar_en.html

samedi, avril 22, 2006

Artbrussels 2006

du vendredi 21 avril au lundi 24 avril 2006
12h à 20h et le lundi de 12h à 22 h.
palais du Heysel
http://www.artbrussels.be/home.htm


Pour sa 24ème édition, artbrussels a invité quelques 170 galeries de 20 pays différents , allant des pays limitrophes, France, Allemagne... à des contrées plus lointaines , tel que, USA, Chine, Russie, Israël...
La Belgique y est représentée par une bonne vingtaine de galerie.

On peut remarquer , par rapport à l'édition précédente, une ligne de conduite moins brouillon, un côté moins foire, plus "propre": beaucoup moins d'installations diverses qui tiennent lieu d'art ultra-contemporain ,une diminution des vidéos, une présence moins nette des artistes " antiquariat", et une très nette place laissée à la photographie et à la remontée de la peinture figurative, d'un réalisme très photographique pour certains. Dommage malgré tout que la qualité me semble dans l'ensemble assez banale. Difficile évidemment, en dehors des tendances purement esthétiques, colorées, parfois tape à l'oeil mais sans grande innovation technique , en dehors de ce qui est une spéculation plus financière,ou d'un effet de mode de trouver ce qui restera une oeuvre d'art. Celle sans précédent, qui a inventé soit un procédé, soit un nouveau point de vue, qui nous émeut, qui restera en dehors de toute mode , moderne en tout temps.

Par contre par la mise en avant du design, préoccupation des mêmes amateurs d'art et architectes prescripteurs d'oeuvre d'art et de mobilier, ne risque t'on pas d'assimiler une oeuvre d'art à un objet de consommation de luxe , certes, mais de consommation, tout de même. L'oeuvre d'art absolue dépasse ce statut.



Si je devais faire une sélection, sans hésitation, une superbe grande photo de Thomas Struth , chez Meert Rihoux , rue du Canal 13 à 1000 Bruxelles, pour le grain parfait, la netteté, l'expression des touristes visiteurs d'un musée italien. Un point de vue en miroir. Mais que regardent t'ils, quelles emotions vivent t'ils profondément, que restera t'il de cette rencontre avec l'oeuvre, et de quelle oeuvre s'agit t'il ?

Et aussi une splendide photo faite par Bettina Rheims.
















Je ne résisterais pas d'avantage devant un superpe petit Richter de la taille d'une carte postale, photo de paysage retouchée de raclures de couleurs chez Springer et Winckler. Superbe galerie proposant Polke, Baselitz, Denmark...
http://www.artnet.com/Galleries/Home.asp?G=&gid=1008&which=&rta=http://www.artnet.com

Et pour un choix de galerie la galerie Voss avec une peinture "photoréaliste " du peintre et DJ Franck Bauer.

http://www.voss-gallery.de/main/home/home.php3?langs=eng








Allez y , faites votre choix et votre opinion.
Bonne visite!

mardi, avril 18, 2006

Obsessions : Kubin -Rops

Hôtel de Ville de Bruxelles et Musée provincial Félicien Rops, NamurDu 18 mars au 18 juin 2006De 10h à 18h, ouvert tous les jours sauf le lundi.

http://www.ciger.be/rops/musee/


Rops (1833-1898) artiste namurois et Kubin ( 1877-1959), artiste autrichien sont tous deux des dessinateurs férus de littérature. Si l’un fût dessinateur et illustrateur de Mallarmé, Barbey d’Aureville, Baudelaire… , l’autre utilisera le dessin et l écriture comme moyens d’expression.
Cette exposition présente une approche de thèmes semblables : la femme, la mort, le démon… mais ce qui semblent les rapprocher les distinguent par le traitement du sujet .


Kubin , dont le mot clef est un monde onirique, disait essayer de fixer ses rêves . Ses visions sont cauchemardesques, peuplés d'un bestiaire effrayant, violent et fantastique. La femme y est dangereuse, la vision de la vie pessimiste et noire est celle d’un homme désespéré, suicidaire , marqué tôt par les épreuves. Sa mère décéda quand il avait 11 ans , et la crise de désespoir de son père fût très marquante. Il écrivit ceci : « Il tira du lit la longue dépouille de sa femme amaigrie par la maladie et, la prenant dans ses bras, il se mit à parcourir la maison en tous sens, en pleurant et comme demandant du secours. ».

La qualité de son travail est plus variable que celle de Rops. Le trait, qu'un Roland Topor ne renierait pas, se simplifie par moment, devenant presque caricatural, condamnation d'une société à la dérive, d'un monde ayant subi les ravages de deux grandes guerres.


Il écrivait à un ami, "Je suis l'organisateur de l'incertain, du tremblant, de la pénombre, de l'onirique"





Le trait de Rops, vif, vibrant, clair, livre une femme « ropsienne » , mystérieuse, envoutante et envoutée, voluptueuse, diabolique, qui lui sert à braver l’ordre social et religieux de la morale bourgeoise de cette bonne petite ville namuroise mais surtout il cherche un nouveau langage esthétique.

« En art, j’ai la haine de toutes les démocratisations.. Et il faudrait que chaque artiste n’apportât à l’examen de ses pairs aucune œuvre qui ne fût personnelle et d’une formule nouvelle »

Rops veut « oser faire du nouveau », oser montrer « au-delà du seuil , ce quelque chose de plus », il veut montrer ce qui reste caché, sans fard aucun.

Il célèbre une femme hors temps, essentielle telle qu’il l’a aimée. Il confiera, à quelques mois de sa mort, à son ami Rassenfosse, artiste liégeois : « Je suis non pas malade mais atteint ! Ah ! ce cœur a bien le droit d’être malade. Depuis soixante ans il tressaille à toutes les émotions . je mourrai cardiaque et impénitent. »


Exposition étonnante, audacieuse et dérangeante aux cimaises namuroises.

vendredi, avril 07, 2006






Soir bleu détail-Hopper-1914
Whitney Museum-NY



"L'art du clown est bien au-delà de ce qu'on pense.Il n'est ni tragique, ni comique; il est le miroir comique de la tragédie et le miroir tragique de la comédie." Suarès
"Le regard"




La Venus d'Urbino- Le Titien -1538
Les Offices-Florence






"L'œuvre que je tiens là- haut sous mes verrous est une exception dans notre art. Ce n'est pas une toile, c'est une femme! une femme avec laquelle je pleure, je ris, je cause et pense. Veux-tu que tout à coup je cesse d'être père, amant et Dieu? Cette femme n'est pas une créature, c'est une création. (...)Vous êtes devant une femme et vous cherchez un tableau (...) Mais elle a respiré je crois!.. Les chairs palpitent." (Le Chef d'œuvre inconnu, Balzac)


Olympia- Manet

Musée d'Orsay-Paris

Le Titien, Manet nous offrent , une féminité audacieuse, si vivante, fixant dans ces toiles , avec génie, cet instant, ce regard direct, toisant chez Olympia, posant presque avec indifférence.

La mise en scène, le piedestal fait par le lit, le drapé des draps et des rideaux, les placent dans une position où notre regard les embrasse.

Jeux de regard croisé, mystère de la relation qui s'établit entre elles et nous.

dimanche, avril 02, 2006

Balthus, nu au chat, 1949 , huile sur canevas
65.1 x 80.5 cm
National Gallery of Victoria, Melbourne, Australia

" Il n'y a pas d'unité
comme lui
ni lune ni fleur dans sa texture:
il est une chose en soi
comme le soleil ou la topaze
et la ligne élastique de son contour
ferme et subtil
est comme la ligne de proue d'un navire.
Ses yeux jaunes
laissent une fente
où jeter le monnaie de la nuit."
Pablo Neruda
Ode au chat